Un témoignage de première main en complément de l'article sur le raid de la Task Force Baum. Nat Frankel, ancien tankiste de la 4th US Armored Division, a livré en 1978 son vécu dans cette unité à travers un ouvrage intitulé Patton's Best. An Informal History of the 4th Armored Division. Le 26 mars 1945, il participe à l'ouverture du corridor nécessaire à l'introduction de la Task Force Baum à travers la petite ville de Schweinheim, au sud d'Aschaffenbourg :
"Schweinheim est un enfer de tirs de bazookas [on imagine des Panzerfaüste ou Panzerschrecken, comme le montre la suite du récit]. Notre artillerie pilonne la zone à l'est de la ville, ce qui est à la fois bien et mal. Bien parce que la résistance à cet endroit sera pulvérisée, mais mal parce que cela donnera peu de motifs aux Allemands retranchés dans la ville d'en sortir... [...] Moins de trois heures après la prise de Schweinheim, les hommes de la 4th Armored Division lui donnent un surnom amené à durer : Bazooka City ! [...] A 100 mètres du premier bâtiment, un Panzerfaust pulvérise un char américain. Les hommes se dispersent et courent se mettre à l'abri : tous y parviennent sauf un. Mais les rues de Bazooka City sont étroites, si étroites qu'elles augmentent la puissance de feu des armes ennemies. Le char endommagé bloque toute progression. Heureusement, les flammes s'éteignent et un soldat parvient à ramper jusqu'à la machine en espérant qu'elle soit encore gouvernable. Ce qui est le cas : il la déplace et un deuxième char s'engage. Celui-ci est plus chanceux : il atteint le bout de la rue et commence à arroser les bâtiments à sa gauche et à sa droite. Mais le char juste derrière lui est touché. Cette fois nous ne pouvons pas le récupérer. Les soldats allemands l'encerclent et font feu de chaque côté pour tenir à distance notre infanterie. Comme si ce n'était pas déjà suffisant, deux Allemands particulièrement finauds grimpent dans le char et se servent du canon de 76. Pour la première fois à ma connaissance dans la 4th Armored Division, un canon américain est utilisé contre des soldats américains, et plutôt bien ! Notre infanterie contre-attaque mais est rejetée. Nous essayons encore une fois. Le bâtiment le plus proche de l'assaut prend complètement feu. La fumée et la chaleur sont intenses [...] Puis la radio crépite et une voix peu claire, inquiète et charitable nous ordonne de retraiter. Il semble que nous sommes battus, mais la victoire peut survenir par des voies quelque peu étranges. Nous avons déjà causé du dégât -au moins 35 prisonniers et un nombre considérable de tués et de blessés, sans doute. En retraitant, nous tirons sur la ville et visons en particulier les niches et les toits où les Allemands ont placé leurs bazookas. Les soldats ennemis se hâtent à bonne distance, et au moment où nous sortons de Bazooka City, la ville est en fait dégagée ! [...] La Task Force Baum peut ainsi passer sans mal dans la rue principale de Bazooka City - dans le sens où il faut deux à trois minutes pour être à portée d'un adversaire mortel. Ils disparaissent à distance, dans le noir. Le piège s'est refermé derrière eux".