Biélorussie, été 1944, près de la frontière polonaise, pendant l'opération Bagration. L'Armée Rouge, après une courte pause, se prépare à avancer de nouveau. Sur une partie du front toutefois, les Soviétiques se heurtent à deux obstacles : une colline sans nom tenue par les Allemands, dont ils ignorent les défenses, et un sniper particulièrement redouté qui abat les officiers de l'Armée Rouge mais aussi les prisonniers récupérés par les éclaireurs soviétiques. Le commandant local, le major Inozemtsev (Andrey Golubev), suspecte à cause de cela que la colline dissimule un piège allemand. Les Soviétiques font appel à un de leurs tireurs d'élité d'exception, qui n'est autre qu'une femme, Olga Pozdneyeva (Viktoriya Tolstoganova), pour abattre son homologue allemand. Celle-ci arrive en même temps que des renforts soviétiques qui comprennent l'ancien détenu de droit commun Kolya Malakhov (Alexey Chadov), un nouveau lieutenant pour commander la section d'éclaireurs, Alexey Malyutin (Vladimir Yaglych), et un sergent de cette section de retour de convalescence, Ivan Bessonov (Alexander Pashutin).
Sur une colline sans nom n'est en réalité pas un film mais un téléfilm russo-biélorusse, de 4 parties d'environ 50 minutes chacune. Dans l'esprit, le téléfilm est en quelque sorte la continuation d'un film comme L'Etoile (Zvezda) de Lebedev (2002), bien que ce dernier soit sans doute plus réussi. Le téléfilm s'intéresse à l'offensive soviétique de l'été 1944, tout comme l'Etoile, et se focalise en particulier sur deux aspects : les éclaireurs, thème déjà choisi pour l'Etoile (avec la présence d'un acteur commun aux deux productions, Anatoliy Gushchin, qui joue à chaque fois un éclaireur), et les tireurs d'élite (influence du Stalingrad de Jean-Jacques Annaud ou prolongation de choix faits sous le cinéma soviétique ? Difficile à dire). Le jeu des acteurs est inégal. Si la plupart s'en sortent assez bien, notamment Tolstoganova qui campe à la perfection le sniper féminin froid et méthodique, Alexey Chadov, qui incarne l'ancien détenu, Kolya, est peut-être un peu trop exubérant par rapport à l'ensemble et a du mal à trouver sa place. On le préfère sans doute dans 9 Rota sorti l'année suivante, et qui traite de l'engagement soviétique en Afghanistan. Mention spéciale cependant aux officiers, bien campés, notamment A. Kot qui joue l'officier du SMERSH fatalement suspicieux de tout.
Un éclaireur soviétique avec l'incontournable PPSh-41.-Source : http://www.imfdb.org/images/1/1d/Soviet_soldier-bv-PPSh-41.jpg |
Le téléfilm vise assez nettement au réalisme, mais l'effort de reconstitution assez impressionnant est cependant parfois gâché des raccourcis ou des erreurs un peu trop visibles. Si le premier épisode commence sur les chapeaux de roue avec un raid de Stukas, l'embuscade montée par des Allemands pris au piège sur les arrières des Soviétiques qui survient peu après, elle, n'est pas très réaliste dans le contexte -tout comme la réaction des soldats de l'Armée Rouge après les premiers tirs, d'ailleurs. Difficile aussi de croire qu'une section d'éclaireurs soviétiques, qui généralement est formée de l'élite de l'unité où elle sert, accepte sans sourciller des anciens détenus de droit commun. L'incorporation, plus tard, d'autres détenus relâchés des prisons militaires, en vue d'une offensive, sonne déjà un peu mieux. Tout comme la présence d'agents allemands infiltrés sur les arrières soviétiques, une obsession des films de guerre russes et soviétiques, mais qui, dans les faits, a réellement existé (bien qu'avec des résultats peu probants). Si les passages concernant les éclaireurs sont bien menés, on est plus sceptique également sur ceux concernant les snipers. Olga opère en effet seule, ce qui est contraire à la pratique de l'époque et qui reste valable aujourd'hui, où les snipers opèrent généralement par paire. En outre, ici, Kolya, qui n'a rien d'un sniper ni du compagnon idéal pour un tireur d'élite chevronné, n'est pas le choix le plus indiqué pour l'accompagner... comme un autre commentateur du téléfilm le notait aussi, l'offensive finale sur la colline est un peu ratée. Les moyens du téléfilm, probablement limités, n'ont pas permis de donner à l'ensemble un final réussi. Les officiers du régiment suivi envoient ainsi une simple section de reconnaissance renforcée dans une attaque frontale (!) sur la colline, alors même que deux Russes servant sous l'uniforme allemand ont fait défection et seraient donc capables de renseigner les Soviétiques sur le dispositif adverse. En outre, il est dit dans le téléfilm que cette attaque doit recevoir un soutien d'artillerie au niveau du corps d'armée pour convaincre les Allemands qu'il s'agit de l'attaque principale et leur faire engager leurs réserves blindées ; or, on voit à peine le tir des mortiers d'un bataillon. Mention spéciale également aux chars allemands et soviétiques bricolés à partir de T-54/55 (!), qui ne trompent personne, contrairement à d'autres films y compris de l'époque soviétique.
Bref, pas une production transcendante du téléfilm de guerre russe, mais qui vaut le coup d'oeil, ne serait-ce que pour l'effort de reconstitution. Pour ceux qui sont intéressés, vous pouvez voir le téléfilm, sous-titré en anglais (mauvaise qualité, mais c'est mieux que rien) ici.