Merci au service de presse pour l'envoi de la revue. Pour ne pas faire doublon avec la recension d'Adrien Fontanellaz, je développerai ici d'autres points.
Avec l'éditorial d'abord, qui me semble encore une fois tirer à tort à boulets rouges sur l'Ecole des Annales. Certes celle-ci a quelque peu boudé l'histoire militaire, mais certains historiens qui en faisaient partie se sont malgré tout intéressés à cette thématique (on pense à Bloch, mais il y a d'en autres, en histoire ancienne par exemple). En outre, l'Ecole des Annales a également fourni, par certains côtés, des éléments qui sont désormais intégrés dans la "nouvelle histoire bataille" chère à Guerres et Histoire. Il me semble donc que c'est une opposition qu'il faudrait enfin surmonter pour faire quelque chose de plus équilibré. Voeu pieux pour l'instant.
- le témoignage est celui de Zvika Gringold, tankiste israëlien qui affronte les blindés syriens sur le plateau du Golan en 1973. Intéressant et plus efficace que l'épisode de documentaire The Greatest Tank Battles sur le même sujet !
- la rubrique Caméra au Poing s'intéresse à la guerre de Crimée. Si comme de coutume les photos sont superbes, le texte, signé Alain Gouttman, rejoint la tendance actuelle qui consiste à remettre au pinacle le Second Empire. Certes, ledit régime n'a pas été épargné par la IIIème République, mais on en est revenu depuis quelques années (j'en ai déjà beaucoup parlé, voir ici par exemple), et j'ai l'impression qu'on tombe désormais dans l'excès inverse qui consiste à ne vanter que les mérites du régime, qui rappelons-le, s'installe après un coup d'Etat et reste, jusqu'au bout, plus ou moins autoritaire et répressif. Ca me désole d'autant plus que c'est une période qui m'intéresse. Là encore, il serait temps d'en faire une histoire dépassionnée...
- le dossier sur la guerre de Cent Ans est un bon dossier de vulgarisation. Laurent Henninger décrit ce qui s'apparente plus à mon sens à une mutation militaire qu'à une révolution. Dans la partie "Cent ans et autant de guerres", par contre, il y a me semble-t-il une erreur p.41 : ce n'est pas Charles Ier d'Orléans qui fait assassiner Jean Sans Peurà Montereau en 1419... pour la simple et bonne raison qu'il est prisonnier en Angleterre depuis Azincourt. Ce sont des proches de Charles VII, effectivement anciennement partisans orléanais, qui organisent probablement l'attentat avec l'accord tacite du souverain. Il y a ensuite une étude fouillée du longbow, une interview de l'historien Philippe Contamineà propos de la campagne de Jeanne d'Arc, puis Benoist Bihan termine en évoquant les transformations qui mènent d'Azincourt à Castillon. A noter que les références, bien présentes p.55, mériteraient peut-être d'un un peu classées par type, ce serait plus clair.
- l'article qui démonte le mythe de la charge des lanciers polonais contre les Panzer(issu, pour le coup, d'un mauvais journalisme) tire sur une ficelle un peu grosse, mais c'est bien mené. Une ou deux références écrites d'ailleurs n'auraient pas été du luxe pour ceux qui, comme moi, auraient voulu approfondir.
- Farid Ameur signe un très bon article d'introduction àla guerre anglo-américaine de 1812 sur laquelle vient justement de paraître un livre en français signalé sur Guerres et conflits. Très instructif.
- la double page sur la Sten résume l'essentiel sur ce pistolet-mitrailleur devenu l'icône de la résistance en Europe occupée, mais qui était loin d'être une arme parfaite.
- avec l'article sur les Champs Catalauniques, je me suis trouvé dans une position assez particulière : c'est en effet un sujet que je maîtrise assez bien, étant donné que j'ai fait mon master/DEA d'histoire sur Sidoine Apollinaire, une des sources ténues sur la bataille en question. On ne peut pas être spécialiste de tout, mais pour le coup, dans mon cas, c'est plutôt vrai pour cette thématique. On peut constater qu'il manque plusieurs ouvrages importants dans la bibliographie indicative (qui n'est qu'indicative, mais quand même), dont le seul (et court) ouvrage en français sur la campagne (recension ici). Sur la question des effectifs, plutôt que des évaluations approximatives des forces en présence, il vaut mieux ne pas se prononcer comme je l'avais fait pour l'Alliance Géostratégiqueici. Quand l'auteur affirme que la Gaule n'a pas connu de bataille aussi importante depuis César, ça reste à prouver, en particulier si l'on pense aux guerres civiles romaines de l'Antiquité Tardive (Lyon, 197, mais aussi Strasbourg, 357, etc). La bataille n'est pas contextualisée (causes de la campagne, etc). La place des Alains au centre ne s'explique pas seulement pour des raisons de fiabilité (un général risquerait-il de perdre le milieu de sa ligne ?), mais aussi parce qu'Aétius souhaite probablement profiter du punch des lanciers cuirassés alains contre les Huns. Quant à la légende de Sainte-Geneviève sauvant Paris, comme le montre Lededynsky, ce n'est probablement qu'une savante construction hagiographique à partir de raids de fourrageurs et des exagérations colportées par les réfugiés fuyant l'avance de l'armée d'Attila. De même, si Aétius cherche à faire contrepoids aux Wisigoths avec les Huns en laissant partir les premiers au lendemain de la bataille, Thorismond sait bien où est son intérêt : les querelles de succession chez les Goths ont toujours été féroces et il doit s'imposer contre ses frères, récupérer le trésor à Toulouse (il meurt assassiné dès 453). Il n'est donc probablement pas si naïf que ne semble le penser l'auteur. Bref, tout cela mériterait d'être approfondi, avec l'emploi de l'ancien mais toujours solide ouvrage de Wolfram sur les Goths (1990).
- Michel Goya livre sa vision, en dix points, d'Ardant du Picq. Ironie du sort, boudé par les Français, il est beaucoup lu chez nos amis d'Outre-Atlantique.
- l'évocation s'intéresse, tout en beauté, aux raids des avions à réaction allemands sur le pont de Remagen.
- intéressant article ensuite de Joanne Taffe sur la New Model Army, l'armée de Cromwell pendant la guerre civile anglaise.
- autre article fort instructif, celui sur les Liberty Ships, une des clés de la victoire américaine pendant la Seconde Guerre mondiale... même si l'effort industriel ne profite pas à tout le monde, et en particulier à la main d'oeuvre desNoirs.
-on trouvera aussi les chroniques habituelles (J.-D. Merchet, Charles Turpin).
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