Octobre 1962. La crise des missiles de Cuba dégénère en guerre nucléaire. Un sous-marin soviétique torpille un porte-avions américain, déclenchant des frappes aériennes américaines sur Cuba, puis une riposte nucléaire soviétique qui détruit Washington. La réponse automatisée des Etats-Unis pulvérise l'URSS, la réplique par les SNLE soviétiques efface New York de la carte. Les Etats du Sud se détachent des Etats-Unis et forment des états néoconfédérés sous la direction d'un Protecteur, qui n'est autre que... Charlton Heston, faisant régner la terreur religieuse et du White Power, arborant les initiales sordides du Klux Klux Klan. Quatre ans plus tard, en 1967, les Etats-Unis moribonds demandent le soutien de leurs alliés anglais et français : le Mexique, derrière lequel manoeuvre la Chine, s'apprête à envahir le Texas pour s'emparer de son pétrole. Le président Kissinger souhaite une intervention franco-britannique mandatée par l'ONU, après l'invasion mexicaine, pour rétablir son pouvoir sur le territoire américain -la Californie ayant fait également sécession sous l'autorité du président Nixon. Mais les Etats-Unis ignorent que le Protecteur a envoyé son âme damnée, frère Lee, capturer un site de missiles Titan miraculeusement épargnée par la guerre nucléaire...
J'avais déjà commenté les premiers tomes de la série uchronique de Delcourt, Jour J. Une série inégale mais avec de très bons volumes néanmoins. Il y a maintenant 15 (!) tomes, et je n'arrive que progressivement à compléter la série, avec le n°9, Apocalypse sur le Texas. Ici, l'événement à l'origine de l'uchronie est la crise des missiles de Cuba, en octobre 1962, qui faillit bien plonger le monde dans une guerre nucléaire. L'entrée en matière est donc satisfaisante (avec une scène fameuse où on fait de la planification stratégique dans une boutique de souvenirs dévastée, avec des jouets en guise de pions), même s'il faut attendre le milieu de l'album pour avoir des explications -incomplètes cependant-, ce qui est un peu dommage.
En effet, si le scénario tient la route, et si l'histoire est palpitante, mais sans être la meilleure de la série à mon avis, c'est au détriment de l'uchronie elle-même. On sait ainsi simplement que Nixon est devenu président de Californie et indépendant suite à l'attaque nucléaire, mais sans plus. L'intervention franco-britannique au Mexique est calquée sur celle de Suez en 1956, et les références à l'expédition française au Mexique de Napoléon III sont évidentes tout au long de l'album -jusqu'au nom du colonel qui assiège les Français dans la base de missiles Titan : Vigo, celui de Camerone... excellente idée par contre que d'avoir fait des Etats du Sud une nouvelle sécession -même si là encore, on aurait aimé en savoir plus- dans le climat délétère des années 1950-1960, autour du White Power, du Klux Klux Klan et du prophétisme religieux (on notera le clin d'oeil assez ironique au général Lee, puisque l'âme damnée de Charlton Heston qui ne laisse que des cadavres et des croix enflammées sur son chemin s'appelle... frère Lee). Tout ça sonne juste. On appréciera aussi la peinture de De Gaulle, la mention du sous-marin Le Redoutable, la discrète allusion au rôle de Kennedy s'il avait survécu (cf la même question qu'on se pose souvent sur le Viêtnam). L'album colle peut-être d'ailleurs un peu trop à une trame historique précise qui, si elle n'est pas connue, risque de dérouter plus d'un lecteur, car les explications ne sont pas là, sans compter, comme je le disais, que tout le développement uchronique n'est pas expliqué (d'où sortent les Etats néoconfédérés de C. Heston, par exemple, etc). Il y a quelque chose de frustrant dans cette série à tomes indépendants, en un seul volume, qui ne permettent pas de développer correctement l'uchronie et le scénario. C'est à mon avis un des défauts majeurs de l'exercice. On le voit bien quand on compare avec les tomes 3 et 4 qui allaient de pair, et qui permettaient justement d'aller un peu plus loin à ce niveau.
Le tome vaut le détour dans la série, assurément, mais pour moi ce n'est pas le meilleur, même s'il est dans le haut de la liste quand même.