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Steven J. ZALOGA et Tony BRYAN, Armored Trains, New Vanguard 140, Osprey, 2008, 48 p.

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Les trains blindés font partie de ces innovations militaires qui ont eu une carrière courte, semblable à celle d'une étoile filante. Leur contribution à la guerre industrielle est, en Occident, relativement méconnue, car ils ont surtout opéré, de fait, sur d'autres théâtres d'opérations : Europe de l'est, Russie et Extrême-Orient principalement. Ce volume de la collection New Vanguard d'Osprey, paru en 2008, comble donc un manque en matière de vulgarisation sur le sujet.

Steven Zaloga rappelle que les premiers trains blindés improvisés sont créés par l'armée austro-hongroise dès les événements révolutionnaires de 1848. Mais c'est la guerre de Sécession qui vit l'utilisation réelle des premiers trains blindés, là encore improvisés : au nord de Baltimore, l'un de ces engins patrouille sur les voies ferrées pour empêcher des saboteurs pro-confédérés de faire sauter les voies, annonçant ce que sera au XXème siècle l'emploi des trains blindés dans la lutte anti-partisans.

Les Britanniques mettent bientôt au point, eux aussi, leurs premiers trains blindés pour la campagne en Egypte et au Soudan, puis pour la guerre des Boers. L'un des épisodes les plus célèbres, le 15 novembre 1899, voit les Boers mettre hors de combat un train blindé en bloquant les voies ; un journaliste présent à bord, un certain Winston Churchill, est capturé à l'occasion. L'anecdote montre la vulnérabilité du train blindé en l'absence de moyen de reconnaissance.

Au déclenchement de la Première Guerre mondiale, ce n'est pourtant pas à l'ouest mais à l'est que les trains blindés vont se révéler fort appréciables. Les Russes en possèdent dès 1914 après de premières expériences durant la révolte des Boxers en Chine et pendant la guerre russo-japonaise de 1904-1905. Les Austro-Hongrois, tout comme les Russes, vont alors procéder à une fabrication industrielle et non plus improvisée de trains blindés. Fin 1915, l'armée russe met ainsi en ligne 15 trains blindés. Russie et Autriche-Hongrie mettent au point de véritables croiseurs sur rail, comme le Zaamurets russe.

Mais c'est à l'occasion de la guerre civile russe que les trains blindés se montrent incomparablement précieux. Ils opèrent avec des détachements embarqués, ou non, de cavalerie et d'infanterie dans un conflit où la mobilité est certaine, autour des voies de chemin de fer qui permettent de rejoindre les villes et centres industriels naissants. Les bolcheviks récupèrent l'industrie de production des trains blindés, en particulier les usines Putilov et le centre de Bryansk. De 23 trains en service fin 1918, l'Armée Rouge en aura, au total, 103 en 1920 ! Ce sont les bolcheviks et l'Armée Rouge qui formalisent, en octobre 1919, la coopération entre le train blindé et son détachement embarqué (desantniy otryad) : il comprend une compagnie d'infanterie, une cinquantaine de cavaliers et une section de mitrailleuses avec 2 tachankas. Dès mars 1919, l'Armée Rouge emploie aussi des ballons pour l'observation à bord des trains blindés. En face, les Blancs utilisent également quelques 80 trains blindés, surtout dans l'armée de Denikine. Zaloga s'attarde -peut-être trop, au détriment d'autres exemples qu'il aurait pu développer- sur le parcours du train blindé russe Zaamurets, qui change à de nombreuses reprises de propriétaire pendant la guerre civile.

En 1920, l'Armée Rouge, qui a envahi la Pologne, se trouve face à une armée régulière qui elle aussi, fait un usage intensif des trains blindés ; à l'automne, les Polonais en ont pas moins de 40. Le Pilsudczyk, le premier train blindé polonais, met hors de combat le Krasnoarmiyetz soviétique et capture quatre autres trains blindés. Les Polonais ont aussi des équipes embarquées et associent parfois leurs trains par deux ; en outre, des chars FT embarqués sur plate-forme peuvent tirer à partir du char ou être débarqués. Les Allemands ne font appel qu'à des trains blindés improvisés, sans fabrication industrielle, surtout à partir de 1918 ; les Ukrainiens manient, eux aussi, quelques trains blindés pendant la guerre civile. En Chine, le seigneur de guerre de Mandchourie Zhang Zuolin récupère, avec l'arrivée des Blancs défait à partir de 1920, des trains blindés qu'il utilise à son compte. Plusieurs sont pris par l'armée du Kuomintang, puis par les Japonais en 1931. Ceux-ci, pour patrouiller les voies, installent plutôt des trolleys, et en particulier l'automitrailleuse Type 91 So-Mo.




Lors de l'invasion de la Pologne, le 1er septembre 1939, les Polonais alignent encore une dizaine de trains blindés : leur puissance de feu s'avère parfois utile mais ils sont très vulnérables à une nouvelle menace, l'aviation. Les Soviétiques en utilisent aussi quand ils entrent en Pologne, à partir du 17 septembre. L'Armée Rouge a continué d'entretenir son effectif de trains blindés, créant également des trolleys à partir des automitrailleuses BA-10 et BA-20 et même un projet de torpille sur rail pour détruire un train blindé ennemi ! Au 22 juin 1941, l'Armée Rouge compte encore 37 trains blindés et le NKVD en aligne également, notamment des croiseurs sur rail MBV D-2. Ils jouent un rôle important dans les batailles de 1941 où beaucoup sont perdus. Les Soviétiques développent progressivement deux nouveaux modèles de trains blindés, l'OB-3 puis le BP-43. 200 trains sont également construits pour la défense anti-aérienne. Les Allemands, à partir de 1941 et surtout 1942, se mettent à utiliser les matériels capturés en Pologne en en URSS pour la lutte anti-partisans. Puis ils construisent un premier modèle de train blindé, le BP-42. Un modèle plus lourd, le BP-44, suit, avec des croiseurs sur rails. En tout, l'Allemagne fabrique 70 trains blindés. Pendant la guerre, l'Italie utilise quelques exemplaires dans la lutte anti-partisans et les Anglais en déploient à l'été 1940 au moment de la menace d'une invasion allemande.





Après la guerre, les Soviétiques et les Polonais utilisent encore leurs trains blindés contre les partisans de l'UPA, puis les Français et les Anglais durant les guerres de décolonisation. Durant la décennie 1960, des trains blindés soviétiques patrouillent la frontière avec la Chine, avec laquelle la tension monte. Puis certains sont encore employés à la chute de l'URSS en Arménie, plus tard en Tchétchénie. La guerre en ex-Yougoslavie voit la création de trains blindés improvisés. 

Le travail de Steven Zaloga, abondamment illustré par des photographies et de profils couleurs de Tony Bryan, est en outre pourvu d'une bibliographie commentée, ce qui est appréciable. Un excellent ouvrage d'introduction au sujet, un travail bien réussi.



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