Le
22 janvier 2015, le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve,
annonce que 73 Français sont morts en Syrie ou en Irak, sur un total
estimé de 1 400 personnes impliquées dans des départs vers ces
deux pays1.
Une coopération plus étroite avec la Turquie, entamée en septembre
2014 et renforcée depuis les attentats contre Charlie Hebdo
en janvier dernier, permettrait d'intercepter plus facilement les
djihadistes à leur retour en France2.
En chiffres absolus, le nombre de Français a explosé entre janvier
2014 et janvier 2015, augmentant de 130% : en nombre absolu, les
Français forment le plus gros contingent d'Europe occidentale. Le
nombre de femmes est en progression. Près de 190 djihadistes sont
déjà revenus sur le sol français3.
Le
témoignage d'un jeune Niçois de 19 ans parti faire le djihad en
Syrie puis revenu en France montre bien le décalage entre les
aspirations des apprentis djihadistes et la réalité sordide sur le
terrain4.
Parti en décembre 2013, ce jeune homme est revenu en juin 2014 et a
été arrêté puis incarcéré. Délinquant, ayant déjà purgé un
an de prison, il rencontre à sa sortie, dans une cité niçoise, un
correspondant local de l'Etat Islamique qui le recrute pour le
djihad. La réalité est cependant beaucoup plus dure : la
formation militaire s'accompagne d'une pratique religieuse frénétique
et imposée, difficile à supporter pour le jeune homme qui n'y est
pas habitué. Il a pourtant retrouvé des camarades niçois sur place
-ils sont 19 à être partis venant de la même barre d'immeubles...
Plus tard, il rejoint la province d'Idlib et passe sous les ordres de
Abou Abdel Larmane, un émir marocain parlant français. L'un de ses
camarades niçois qui veut rentrer est jugé sommairement puis
décapité. Le jeune Niçois lui-même devient bourreau, exécuta nt
des Syriens qui refusent de payer l'impôt à l'Etat Islamique. Le
jeune homme, à bout de nerfs, ment pour échapper au conflit :
il prétend pouvoir recruter d'autres personnes s'il repart en
France, et fausse compagnie à ses accompagnateurs à Bruxelles5.
Autre
profil, ce délinquant du Loir-et-Cher, qui ne s'est pas présenté
au tribunal correctionnel de Blois : converti à l'islam en
prison, il serait parti pour la Syrie en décembre 2014. Il vient
d'une famille recomposée où le père était lui-même un
délinquant. Il s'est converti durant son séjour dans la prison de
Châteaudun, puis a continué à fréquenter des fondamentalistes à
Dreux6.
Fin janvier 2015, c'est un couple d'Orléanais, déjà repérés par
les services de renseignements, qui est arrêté par hasard, après
un début d'incendie près de leur immeuble : ils étaient en
possession d'armes et souhaitaient manifestement rejoindre l'Etat
Islamique en Syrie7.
Le 27 janvier, un coup de filet de la police à Lunel conduit à
l'arrestation de 5 personnes, dont 3 de retour de Syrie. Lunel est
l'une des villes de départ les plus importantes pour le djihad
syrien : une vingtaine de personnes en tout, dont 6 au moins ont
été tuées depuis octobre 2014. Parmi les 6 morts, on est loin de
profils de désoeuvrés : un étudiant en informatique, un
gérant de café et un maçon. La mosquée al-Baraka de Lunel, qui
pencherait pour le fondamentaliste, est pointée du doigt. Mais le
taux de chômage est également très important dans la localité8.
En janvier 2015, 2 Ardéchois et un Drômois ont trouvé la mort en
Syrie. Ce sont tous des majeurs, âgés de moins de 35 ans. Un autre
Ardéchois, blessé en Syrie, a été interpellé à son retour en
France et placé en détention9.
Une dizaine d'autres personnes originaires de ces deux départements
seraient toujours en Syrie actuellement.
On
sait désormais qu'une dizaine de Français combattant en Syrie ou en
Irak sont d'anciens membres de l'armée. L'un d'entre eux, devenu
émir dans la province syrienne de Deir es-Zor, forme les nouveaux
arrivants. D'autres sont des spécialistes des explosifs. L'un
d'entre eux a même servi au sein du 1er RPIMa, unité classée
forces spéciales, avant de faire partie d'une société de sécurité
privée et de se radicaliser lors d'un séjour dans les pays du
Golfe. Licencié, il a ensuite gagné la Syrie. Il avait quitté
l'armée française en 199810.
Le 3 février, un coup de filet de la police française démantèle
une filière d'acheminement de combattants en Syrie. 8 personnes sont
arrêtées en Seine-Saint-Denis et en région lyonnaise, dont 3 de
retour de Syrie11.
Omar Diaby/Omsen, le chef spirituel des Français d'al-Nosra, est
toujours à la tête de sa katiba : il continue de donner
des interviews aux journalistes français12.
Mercredi 11 février, l'Etat Islamique annonce qu'un Français,
Abou-Talha al-Faransi, figure parmi les 3 kamikazes ayant attaqué au
camion piégé un campement de miliciens chiites près de camp
Speicher, au nord de Tikrit, dans la province de Salahaddine13.