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S. GOLIAKOV et V. PONIZOVSKY, Le vrai Sorge, J'ai Lu Leur Aventure 233, Paris, J'ai Lu, 1970, 310 p.

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Me voici de retour pour tenir les fiches de lecture habituelles... je terminais mon deuxième ouvrage, dont je reparlerai plus tard. Par ailleurs, le suivi du conflit syrien me prend aussi beaucoup de temps.

Encore un volume de la collection bleue des éditions J'ai Lu : la traduction de l'ouvrage de deux auteur soviétiques (le sous-titre est d'ailleurs : L'affaire Sorge vue de Moscou) qui traite du fameux espion Richard Sorge.

Richard Sorge est cet espion soviétique, qui a été en poste en Allemagne puis au Japon, et qui a fourni de nombreux renseignements sur ces deux ennemis de l'URSS, jusqu'à son arrestation en octobre 1941. Les Soviétiques ne tentent pas de le récupérer et Sorge est finalement exécuté par les Japonais le 7 novembre 1944. L'URSS lui accorde le titre de Héros de l'Union Soviétique vingt ans plus tard, en 1964.

Ce livre a donc été écrit pendant la guerre froide, probablement au moment de la reconnaissance de Sorge par l'URSS. Fils d'ingénieur des mines en Azerbaïdjan, Sorge a cependant grandi en Allemagne où sa famille s'est ensuite installée. Son oncle avait été le secrétaire de Karl Marx. Il sert dans l'armée allemande pendant la Grande Guerre. Gravement blessé, c'est là, selon les auteurs, qu'il se serait mis à détester la guerre pour sa triste réalité. Il se convertit d'ailleurs au communisme pendant sa convalescence. Dès 1920, il sert comme agent du Komintern en Allemagne, effectue des aller-retour entre ce pays et Moscou. Passé au GRU, le renseignement militaire, en 1928, sous la houlette de son chef Berzine, il oeuvre deux ans plus tard à Shanghaï sous la couverture d'un correspondant pour un journal allemand, le Frankfurter Zeitung. C'est là qu'il rencontre Ozaki, un journaliste japonais qui sera plus tard l'une de ses principales sources.

Rapatrié en URSS en 1932, il repart en Allemagne l'année suivante, juste après la prise du pouvoir par les nazis, pour obtenir une accréditation au Japon, car le GRU souhaite obtenir le maximum d'informations à la fois sur cet ennemi potentiel, mais aussi sur l'Allemagne, perçue comme une menace avec l'entrée en scène d'Hitler. Sorge bâtit au Japon un réseau d'informateurs très précieux : il bénéficie de contacts auprès des hommes politiques japonais influents, et par ailleurs il se construit une façade en adhérant au NSDAP et en étant proche de l'ambassadeur allemand, Ott, un agent de l'Abwehr. Il a joué un rôle important pour prévenir Moscou des manoeuvres japonaises, en particulier lors des conflits aux frontières de la Mandchourie, en 1938-1939. En 1941, il prévient également Staline de la menace d'une attaque allemande, fournissant même la date exacte de Barbarossa (ce qui est la version soviétique, non confirmée par les archives), mais Staline n'en a cure, et se méfie de Sorge, qu'il n'apprécie pas. Après l'invasion allemande, le travail de Sorge consiste à déterminer si les Japonais vont, ou non, ouvrir un second front contre l'URSS à l'est. Cependant, il ne faut pas sur-estimer l'impact de Sorge dans le dénouement de la bataille de Moscou : le transfert de réserves depuis l'Extrême-Orient et l'intérieur de l'URSS a en fait commencé dès avant l'opération Barbarossa. Les Japonais, un peu par hasard, finissent par mettre la main sur Ozaki, puis sur Sorge.

Le travail des deux auteurs soviétiques, qui se lit comme un roman, est intéressant par ce qu'il et parce qu'il ne dit pas. Le nom de Staline n'apparaît, me semble-t-il, pas une fois dans le texte : rien n'est dit d'ailleurs du dédain affiché par le Vojd pour Sorge -même si on voit, dans une scène fameuse, celui-ci pleurer lorsqu'il découvre l'annonce de l'agence TASS du 14 juin 1941, qui confirme l'aveuglement de Staline sur les intentions allemandes. Les déboires sentimentaux et la surconsommation d'alcool de l'espion sont également passés sous silence, les deux auteurs préférant insister sur les succès obtenus et les informations rapportées -jusqu'à l'excès, comme on vient de le dire. Cependant, on ne peut nier que Sorge a bâti l'un des réseaux de renseignement les plus utiles pour l'URSS dans cette période critique des années 30 à 1941.




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