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Ron FIELD, Robert E. Lee, Command 7, Osprey, 2010, 64 p.

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La collection Command d'Osprey (récemment arrêtée comme une ou deux autres car ne remportant pas le succès escompté, et confirmant par-là la prééminence de la Seconde Guerre mondiale dans les ventes) tente de dresser le portrait des grands chefs de guerre de l'histoire militaire. Ce n'est que le deuxième volume de la collection que je lis jusqu'à présent. Il est signé Ron Field, un spécialiste de la guerre de Sécession.

Sujet ardu que celui de Robert E. Lee, chef de l'armée de Virginie du Nord, encore aujourd'hui très populaire en particulier dans les états du Sud des Etats-Unis. Brillant tacticien, Lee a pourtant péché dans le domaine de la stratégie, en particulier parce que son caractère le soumettait à des faiblesses préjudiciables. En outre Lee s'est certainement trop concentré sur le théâtre oriental des opérations, alors que son dernier adversaire, Grant, a commencé sa carrière à l'ouest, et a une vision nettement plus globale du conflit. Grant réussit à user l'armée de Virginie du Nord en manoeuvrant autour de Richmond, et Lee, s'il inflige de lourdes pertes à l'Union, ne peut compenser les siennes. Il faut dire aussi que Lee a connu des problèmes de santé, souffrant notamment d'une attaque cardiaque en avril 1863. Il n'empêche qu'on n'a pas hésité à le ranger dans le panthéon des grands généraux, aux côtés d'Hannibal, César, Frédéric II, Napoléon, etc.



Né en 1807, Lee est le fil d'un aristocrate virginien héros de la Révolution américaine. Mais son enfance n'est guère heureuse : son père, criblé de dettes, est contraint à l'exil, et meurt alors qu'il n'a que 11 ans. Malade, sa mère est invalide. Il reçoit une excellente formation classique à l'académie d'Alexandrie, puis rejoint West Point. Il est l'un des éléments les plus brillants de sa promotion puisqu'en 1829, il est second sur 46 et rejoint le génie. Il participe à l'érection ou à l'entretien de divers forts, et épouse en 1831 Mary Anna Randolph Custis, dont les parents possèdent la propriété d'Arlington, de l'autre côté du Potomac, en face de Washington : il aura d'elle plusieurs fils qui serviront pour certains dans l'armée confédérée. Capitaine en 1838, Lee travaille aussi à la délimitation des frontières de nouveaux Etats et à la défense côtière de l'Atlantique. En 1846, il prend part à la guerre contre le Mexique : pendant le siège de Vera Cruz, il manque d'être tué par une sentinelle américaine ! Dans l'état-major du général Scott où il est affecté, il y a aussi deux de ses futurs adversaires, McClellan et Meade. Lee joue un rôle important dans les victoires de Cerro Gordo et du château de Chepultepec, à l'issue de laquelle il est nommé lieutenant-colonel. Après la guerre, il reprend ses fonctions dans le génie, avant de diriger West Point de 1852  à 1855. Avec l'extension de la frontière et les conflits avec les Indiens, de nouveaux régiments sont créés et Lee part rejoindre le 2nd Cavalry dans l'ouest du Texas. En visite à Arlington en octobre 1859, en l'absence de Scott à Washington, c'est à lui qu'incombe de défaire John Brown, qui a tenté de soulever les esclaves à Harper's Ferry. Lee mène l'assaut de main de mettre avec le renfort d'un certain lieutenant Stuart, du 1st Cavalry. C'est lui qui commande la troupe durant l'exécution de Brown, le 29 novembre suivant. Quand le Texas fait sécession, en février 1861, Lee regagne Washington, où il est nommé colonel du 1st Cavalry le 3 mars 1861 par Lincoln. Mais il refuse de prendre la tête des armées de l'Union pour ne pas combattre son état, la Virginie. Il démissionne de l'armée le 20 avril et prend la tête des forces de la Virginie deux jours plus tard.

L'armée nordiste occupe sa demeure d'Arlington un mois plus tard. Lee organise la défense de la Virginie : il concentre les troupes à Manassas Junction, dans la Péninsule, près du Potomac et dans la vallée de Shenandoah, tous les secteurs où le Nord peut manoeuvrer pour faire tomber Richmond. Il fait déplacer l'infrastructure de fabrication des armes de Harper's Ferry à Richmond également. Le 8 juin, les troupes virginiennes rejoignent l'armée confédérée. Le 28 juillet, il prend le commandement des forces dans le nord-ouest de la Virginie, une région hostile à la Confédération et qui accueilli à bras ouverts les troupes de McClellan. Cette première campagne de Lee est un échec : et notamment parce que le général confédéré n'a pas su se confronter à un de ses subordonnés réticents, Loring. Le président Davis le charge alors de protéger les côtes de Caroline du Sud et de Géorgie, menacées par les raids nordistes. Lee s'attèle à la tâche avec brio, concentrant la défense, préparant des batteries et des forts, fortifiant Savannah et Charleston pour les rendre imprenables par mer.

Le 2 mars, il est rappelé à Richmond pour prendre le commandement des forces confédérées après les premiers succès nordistes dans l'ouest. Le 4 avril, McClellan, le nouveau chef nordiste, débarque dans la péninsule de Virginie. Le commandement sudiste est divisé, Joseph Johnston préférant se replier pour couvrir les autres fronts alors que le président Davis y est opposé. Le 31 mai, Lee remplace au pied levé Johnston blessé et prend la tête de ce qui deviendra l'armée de Virginie du Nord. Par de savantes manoeuvres, Lee parvient à bloquer la progression de McClellan durant les batailles des Sept Jours (25 juin-1er juillet 1862) mais subit de lourdes pertes. Les nordistes doivent rembarquer : Lee a gagné du temps pour réorganiser l'effort de guerre du Sud. Pour contrer le nouveau commandant nordiste, Pope, Lee prend l'initiative des opérations et passe à l'offensive. A Manassas Junction, sur les lieux mêmes de la victoire de 1861, il réédite l'exploit en écrasant l'armée nordiste le 30 août 1862, mais ne peut la détruire complètement. Là encore, Longstreet, un de ses subordonnés, a profité des errements de Lee qui n'a pas souhaité imposer ses directives.

En septembre 1862, Lee envahit pour la première fois le Nord, pour piocher dans la sympathie du Maryland pour regonfler son armée et obtenir la reconnaissance britannique de la Confédération. Mais les désertions sont nombreuses, le plan de campagne tombe aux mains des nordistes, et Lee ne doit qu'aux hésitations de McClellan de se sortir non sans mal de la bataille d'Antietam, le 17 septembre. La reconnaissance internationale commence à s'évanouir tandis que Lincoln annonce une proclamation d'émancipation des esclaves. Burnside, qui succède à McClellan, veut marcher sur la Virginie et franchir la Rappahannock. Mais le temps est mauvais, les lenteurs bureaucratiques empêchent de disposer rapidement de ponts flottants, et les assauts nordistes à Fredericksburg viennent mourir sous le feu des confédérés bien retranchés sur les hauteurs de Marye's Heights. Hooker remplace Burnside le 26 janvier 1863. Il franchit en avril la Rappahannock plus en amont et s'installe autour de Chancelorsville. Le 2 mai, Lee, à deux contre un, prend un gros risque en envoyant Jackson et le gros de la troupe mener une attaque de flanc, qui se transforme en succès éclatant. Hooker doit repasser le cours d'eau deux jours plus tard. Malheureusement, le succès est chèrement payé par la mort de Jackson, blessé par une sentinelle sudiste, quelques jours plus tard. Or Jackson était l'officier qui interprétait sans doute le mieux les ordres de Lee.

La victoire de Chancelorsville a pourtant été coûteuse, et les succès nordistes à l'ouest font pencher Richmond pour l'envoi d'une partie de l'armée de Lee sur place. Lee pense être contraint à l'initiative une dernière fois avant d'être enfermé dans Richmond et asphyxié par la supériorité numérique et matérielle du Nord. Protégée par la cavalerie de Stuart, l'armée de Virginie du Nord se met en marche en juin 1863 vers le Maryland puis la Pennsylvanie. Mais le 22 juin, Lee commet à nouveau l'erreur de ne pas être suffisamment clair avec Stuart, qui doit éclairer l'armée mais a aussi latitude pour mener d'autres actions indépendantes, ce que Stuart interprète comme la permission de conduire un raid plus en avant. Lee avance donc en aveugle, apprenant le 29 juin d'un espion, Harrison, que l'armée du Potomac toute entière le suit à la trace. Il fait converger ses forces sur Gettysburg, où le 30 juin s'est installée la cavalerie nordiste de Buford. Le corps de Hill, surpris par la présence des cavaliers, engage massivement le combat le lendemain. Les nordistes sont repoussés mais parviennent à se retrancher sur Cemetery Ridge, au sud de Gettysburg, et reçoivent des renforts. Lee est cependant persuadé d'avoir la supériorité numérique et le dessus au final. Le 2 juillet, Lee fait porter l'effort à droite, tandis que des diversions doivent être menées au centre et à gauche. Mais Longstreet, peu convaincu des manoeuvres de Lee, rechigne et l'attaque à droite prend du retard, alors que la diversion à gauche reste timide. Les gains restent limités. Le 3 juillet, Lee est persuadé de pouvoir enfoncer le centre nordiste avec 15 000 hommes, notamment ceux de la division Pickett du corps de Longstreet, et une puissante artillerie de plus de 160 pièces. Mais l'assaut est un échec. Le lendemain, Lee doit se replier. Le 8 août, il envoie une lettre de démission au président Davis, qui la refuse.

Deux divisions sous Longstreet partent combattre à l'ouest en septembre, tandis que Lee tente un dernier effort en octobre-novembre 1863 contre Meade, le commandant nordiste. Les opérations stagnent à l'est jusqu'à l'arrivée du nouveau commandant en chef nordiste, Grant, le 12 mars 1864. Lee bloque l'avance de Grant dans la Wilderness en mai, mais le chef nordiste ne recule pas. En outre, la cavalerie nordiste a gagné en efficacité depuis Gettysburg et inflige une nouvelle perte cruelle à Lee -qui a déjà perdu Longstreet, blessé- en abattant Stuart, le flamboyant cavalier confédéré, à Yellow Tavern, le 9 mai. Grant multiplie les assauts frontaux coûteux, comme à Cold Harbor, le 4 juin, mais en dépit de 60 000 pertes, il est arrivé à moins de 10 km au nord de Richmond. Pour arrêter l'usure de ses troupes, Grant décide de contourner la capitale et de l'étrangler en prenant Petersburg, au sud. Lee doit défendre à la fois Richmond et Petersburg, mais envoie l'armée d'Early pour menacer Washington. Il ne parvient pas à desserrer l'étau. Une dernière contre-attaque vers l'extérieur en mars 1865 échoue. Sheridan revient le même mois de la vallée de la Shenandoah où il a défait les confédérés. Début avril, Lee abandonne Petersburg, Richmond tombe. L'armée de Lee, qui avance à l'ouest, est finalement contrainte à la reddition le 12 avril à Appomatox.

Lee, pendant la guerre de Sécession, est le digne élève de Jomini, qui lui-même interprète les principes de Clausewitz et la mise en pratique de ceux-ci par Napoléon. Les batailles de Manassas en 1862 ou de Chancelorsville en 1863 en sont l'illustration. Mais Lee a parfois fait preuve d'incompréhension à l'égard des nouvelles caractéristiques de la guerre de son temps : la charge de Pickett l'illustre parfaitement. Les réactions de Lee tiennent aussi à son milieu d'origine et à son éducation : élevé dans un monde relevé, Lee est sobre, fait preuve de beaucoup de retenue, n'aime pas la confrontation. Son système de commandement assez décentralisé fonctionne tant qu'il est en symbiose avec les chefs de corps : mais quand ce n'est plus le cas, les disfonctionnements se multiplient.

Revenu à Richmond, Lee prend la direction d'un collège de Virginie en octobre 1865. Il signe la déclaration d'amnistie consentie par le président Johnson, mais le document sera ensuite perdu jusqu'en 1970 (!). Victime d'une autre attaque cardiaque en octobre 1869, il décède finalement un an plus tard d'une pneumonie après une nouvelle attaque. Les premiers travaux consacrés à Lee sont largement inspirés par l'historiographie de la "cause perdue", qui présente les Sudistes comme de preux chevaliers vaincus seulement par le nombre -un montage peut-être suggéré par certaines remarques de Lee lui-même, de son vivant. Il faudra attendre les années 1960 pour que le mythe commence enfin, véritablement, à céder la place à l'histoire.

Au final, une bonne introduction au personnage. On aimerait simplement qu'il y avait davantage de cartes pour suivre certaines campagnes, et malgré la présence d'une bibliographie en partie commentée dans les dernières lignes, il est peut-être un peu dommage que le propos se concentre surtout sur le récit et non pas sur l'analyse, en particulier en ce qui concerne le talent militaire de Lee et ses sources d'inspiration (via sa formation militaire notamment). Vu le format, il était bien sûr difficile de tout aborder, et l'auteur a dû faire des choix : la description prime donc sur l'interprétation. La bibliographie permettra sans doute de couvrir les autres aspects. 





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