La collection Duel d'Osprey, lancée en 2007, compare deux machines opposées lors d'un conflit, de leur développement jusqu'à leur rencontre sur le champ de bataille. Dans ce volume de 2008, Peter Davies, spécialiste des appareils américains, signe son premier volume pour Osprey en mettant face-à-face le F-4 Phantom II de l'USAF et le MiG-21 de la VPAF pendant la guerre du Viêtnam. L'arrivée du MiG-21 dans les cieux nord-viêtnamiens en 1966 change en effet la donne pour l'USAF qui se retrouve face à un adversaire encore plus dangereux que les MiG-17 ou 19 déjà utilisés par Hanoï.
La partie Développement montre bien les différences de conception des deux appareils. Initialement le F-4 Phantom II est conçu pour la Navy, qui souhaite un intercepteur capable de protéger les porte-avions, d'où les deux réacteurs pour la survie de l'appareil. Le F-4 est pensé pour engager les avions ennemis avec des missiles air-air à guidage radar (d'où la présence d'un second membre d'équipage, l'opérateur radar) ou infrarouge, c'est pourquoi il est dépourvu de canons pour le combat rapproché. Son caractère sophistiqué le rend vulnérable au climat d'Asie du Sud-Est et les transmissions ne sont pas le point fort de l'appareil. Le MiG-21, au contraire, est un appareil rustique, destiné à être produit en grandes quantités : il compte sur sa vitesse et son taux de montée pour intercepter les bombardiers américains au missile ou les détruire en combat rapproché au canon.
Plusieurs versions du F-4 servent au Viêtnam, le C, le D et le E, enfin équipé d'un canon dans le nez. Le MiG-21, qui est l'un des appareils à réaction les plus construits avec sans doute plus de 10 000 exemplaires livrés, a été fourni par l'URSS à raison de peut-être 40 appareils par an. 13 des 17 as de la VPAF ont volé sur MiG-21. On trouve les versions C, D, F et J, ainsi que des versions d'entraînement biplaces.
Dès son entrée en service, en 1966, le MiG-21 est utilisé en conjonction avec les MiG-17 et MiG-19, en effectuant des interceptions à haute altitude. Côté américain, si certains pilotes de l'USAF sont des vétérans de la Corée ou de la Seconde Guere mondiale, la politique de rotation rapide des personnels produit, comme dans les forces terrestres, un manque d'expérience évident, d'autant que l'USAF n'entraîne plus ses pilotes au combat aérien rapproché. En face, les pilotes nord-viêtnamiens, servent plusieurs années, voire toute la guerre, et bénéficient d'une formation au dogfight par leurs instructeurs russes. Hésitants et malhabiles en 1966, ils forment un groupe beaucoup plus cohérent en 1972 lors des offensives Linebacker, un constat réalisé par les pilotes américains eux-mêmes. En outre, à ce moment-là, les effectifs sont passé à une centaine d'appareils en ligne. Ils sont su s'adapter et ont finalement réussi à tenir la dragée haute aux changements imposés par les Américains, y compris pendant les opérations Linebacker de 1972.
Frustrés au départ par leurs piètres résultats, les pilotes américains, confrontés au caractère erratique de leurs missiles, sont revigorés par l'opération Bolo du colonel Olds, en janvier 1967, conçue pour redorer le blason de la chasse américaine face aux MiG. Olds, vétéran de la Seconde Guerre mondiale, craint d'ailleurs plus à ce moment-là les MiG-17 que les MiG-21. Mais ceux-ci apprennent et dès l'automne 1967, ils sont devenus beaucoup plus redoutables. Ils mettent au point de nouvelles tactiques pour contrer la supériorité américaine.
L'efficacité des MiG-21 tient d'abord à un bon contrôle radar depuis le sol, et à l'inexpérience des pilotes américains en combat aérien et aux défaillances de leurs missiles. Après Bolo, les MiG-21 réduisent leur désavantage dans le ratio de pertes avec leurs nouvelles tactiques, jusqu'à l'arrêt de Rolling Thunder en 1968. L'échec viêtnamien pousse l'USAF, après le conflit, à développer de nouvelles structures de commandement et de contrôle, de nouveaux programmes d'entraînement (Red Flag) et de nouveaux appareils (F-16 et surtout F-15), des changements qui montreront leur efficacité pendant la guerre du Golfe.
Pourvu d'une bibliographie, et malgré une petite erreur dans le texte (confusion entre Linebacker I et Linebacker II), ce volume Duel est un bon ouvrage d'introduction au sujet mais n'apportera rien au connaisseur. Ce format ne peut en effet remplacer des livres plus conséquents comme celui de Michel sur les combats aériens au-dessus du Nord-Viêtnam.