Le hors-série n°32 du magazine 2ème Guerre Mondiale est consacré aux batailles en Hongrie de 1944-1945. Il est signé Jean-Philippe Liardet, responsable de Conflits et Stratégie (qui édite l'ensemble du label Champs de bataille), et habitué du sujet, puisqu'il a déjà réalisé plusieurs articles ou numéros de magazines sur un sujet approchant.
Après une brève présentation de la Hongrie pendant l'entre-deux-guerres, Jean-Philippe Liardet revient sur l'engagement du pays aux côtés de l'Allemagne, en particulier à l'est, entre 1941 et 1943. Le contentieux avec la Roumanie empoisonne les relations au sein de l'Axe et, au moment de la contre-offensive soviétique autour de Stalingrad, les troupes hongroises sont décimées sur le Don.
La Honved est donc réorganisée dès l'automne 1943 et quand l'Armée Rouge atteint les Carpathes, en mars 1944, l'armée allemande occupe la Hongrie pour prévenir une défection probable d'un allié chancelant. L'armée hongroise, refondue et en partie rééquipée de matériel allemand, montre certaines qualités, mais qui ne peuvent compenser les propres faiblesses d'une Wehrmacht alors en perte de vitesse, notamment sur le plan humain. Le 20 août 1944, l'offensive soviétique met la Roumanie hors-jeu et la retourne contre l'ancien allié allemand, tout en permettant à l'Armée Rouge de contourner par le sud les Carpathes. En remontant vers le nord et la plaine hongroise, les Fronts d'Ukraine subissent encore, en octobre 1944, un revers tactique conséquent autour de Debrecen, mais qui n'influe en rien sur la situation stratégique.
Les Soviétiques reprennent l'offensive en direction de Budapest en novembre et la capitale hongroise est définitivement encerclée en décembre. Près de 80 000 soldats allemands et hongrois sont pris au piège. Alors que les Soviétiques investissent la ville, assez lourdement défendue, Hitler dépêche sa seule réserve notable, le IV. SS-Panzerkorps, pour mener une tentative de dégagement, l'opération Konrad, le 1er janvier 1945. Mais celle-ci, comme les opérations suivantes, Konrad II et III, ne parvient pas à desserrer l'étau. Pest tombe le 16 janvier, juste avant Konrad III, puis Buda le 13 février.
Hitler continue cependant d'attaquer en Hongrie alors même que l'opération Vistule-Oder pulvérise le front allemand et amène l'Armée Rouge à 60 km de Berlin. Les contre-attaques successives en février-mars 1945, dont l'opération Frühlingserwachen (Réveil de printemps), ne mènent à rien. L'armée hongroise se désintègre progressivement. Le 16 mars, les Soviétiques entament leur offensive en direction de Vienne, atteinte dès la mi-avril. Pour l'auteur, c'est surtout la contre-offensive des Ardennes qui, au final, empêche les Allemands de stabiliser correctement la situation à l'est et en particulier en Hongrie.
Ce hors-série est clairement orienté vers la vulgarisation : d'une lecture simple, le récit des opérations coule bien, même si quelques cartes supplémentaires n'auraient pas été de trop, en particulier pour suivre les contre-attaques allemandes de 1945. L'illustration est un autre point fort du numéro, avec de nombreuses photos parfois originales et bien légendées et les beaux profils couleurs de Thierry Vallet. Quelques coquilles sont passées au travers de la relecture. Le défaut principal, à mon sens, tient à qui connaît déjà le travail de Jean-Philippe Liardet sur ces combats en Hongrie : l'auteur évoque essentiellement le côté allemand et hongrois et néglige le côté soviétique. Celui-ci se résume dans le hors-série à quelques phrases de généralités et au listing des unités qui font face aux Allemands. Rien n'est dit sur la performance stratégique, opérative ou tactique de l'Armée Rouge, une absence que l'on peut constater également dans les encadrés (un chef de front comme Malinovski, présent de bout en bout, en aurait mérité un). L'analyse de Jean-Philippe Liardet trouve donc là sa principale limite, ce qui est confirmé avec la bibliographie indicative (commentée) citée p.78 qui ne comprend que des ouvrages abordant le côté allemand et hongrois. En résumé, un bon hors-série pour ceux qui veulent encore un aperçu de la dimension allemande et hongroise des combats, mais pas pour ceux qui recherchent un point de vue équilibré entre les deux camps.