Jacques Delperrié de Bayac est un journaliste et écrivain français, auteur de plusieurs ouvrages à caractère historique sur la Seconde Guerre mondiale, en particulier. Ce livre consacré aux Brigades Internationales est le premier signé par cet auteur.
Les Brigades Internationales sont passées au rang du mythe bien avant leur dissolution en 1938. Ce qui explique, sans doute, que leur mémoire soit si disputée. 35 000 volontaires, provenant d'une cinquantaine de pays différents, viennent ainsi se battre aux côtés de la République espagnole. Contre Franco soutenu par l'Allemagne nazie et l'Italie fasciste ; en raison du non-engagement des démocraties ; à cause de la forte immigration en Europe occidentale ; et de l'organisation de l'Internationale communiste. Les brigadistes sont majoritairement des ouvriers, d'un âge moyen autour de 29-30 ans : beaucoup sont des militants communistes mais s'engagent surtout par antifascisme. Les pertes sont telles cependant, que dès l'été 1937, les Espagnols intègrent en masse les Brigades Internationales : leur engagement dans la guerre d'Espagne n'a rien d'une épopée romantique mais a tout de l'enfer de Verdun, ou presque.
Contrairement à ce que l'on pourrait croire, la mémoire communiste des Brigades Internationales n'a pas été très vive. La brochure, en France, dédiée au sujet par le PCF gomme l'intervention du Komintern et tous les conflits propres au camp républicain et qui ont contribué à son effondrement. En France, le rôle des brigadistes est occulté par celui des résistants de la Seconde Guerre mondiale qui ont, eux, le bénéfice d'avoir remporté leur combat. En outre, avec la guerre froide, les anciens brigadistes sont suspectés par Moscou d'avoir collaboré à l'époque avec des Yougoslaves proches de Tito, ou des Américains qui ont servi, eux aussi, dans les Brigades Internationales. Le livre de Delperrié de Bayac s'inscrit dans ce contexte : paru en 1968, il s'avère bien plus sérieux que certains ouvrages d'historiens sur la guerre d'Espagne. Il faudra attendre, de fait, les années 1990 pour qu'un véritable travail de fond soit mené sur le sujet en France par les historiens universitaires.
Le journaliste décrit ainsi la formation, l'engagement et le retrait des Brigades Internationales, de 1936 à 1939, car certains brigadistes combattent cependant jusqu'à la chute de la République espagnole. Delperrié de Bayac traite son sujet avec modestie et sans compromis : il ne cache rien des affrontements au sein du camp républicain, ni des faiblesses structurelles des Brigades Internationales, sans les décrier. Des cartes placées au fil du texte permettent de se repérer quand l'auteur évoque les grandes offensives auxquelles participent les brigadistes ainsi que de saisir l'évolution globale du conflit. Le journaliste s'appuie essentiellement sur des témoignages écrits au moment des événements ou par la suite, et la lecture de l'ensemble est plutôt agréable. Sur le plan militaire, la faiblesse des Brigades Internationales tient au manque des appuis (artillerie,blindés, aviation) ou, parfois, à leur mauvaise utilisation. L'absence de formation ou d'expérience militaire ne peut aussi complètement suppléer à l'immense courage et à la volonté de certains brigadistes. En outre, la cohésion n'est pas toujours au rendez-vous, ne serait-ce qu'en raison de la barrière linguistique. Cela n'a pas empêché certains officiers de devenir de véritables meneurs d'hommes, et les Brigades d'être fréquemment utilisées comme troupes de choc sur les points chauds ou lors des grandes offensives républicaines. Les brigadistes connaissent aussi, bien évidemment, la terreur communiste propre à l'histoire de la République espagnole pendant le conflit. On est frappé en revanche de voir combien les prisonniers sont plutôt respectés, même si lors de certains combats, les affrontements sont sans pitié -au feu.
Jacques Delperrié de Bayac propose, en annexes, le statut des Brigades Internationales du 27 septembre 1937, des extraits de discours sur les Brigades, la liste de celle-ci, une autre avec certains conseillers soviétiques, une chronologie des brigades, une analyse de leurs journaux et quelques pages sur la Centrale Sanitaire Internationale.
A l'heure où certains préfèrent s'intéresser, au contraire, aux volontaires étrangers ayant servi aux côtés de Franco, il est bon parfois de revenir à des "classiques" comme cet ouvrage désormais ancien, sans doute dépassé par les travaux plus récents, tels ceux de Rémy Skoutelsky, mais qui permettent de démonter quelques lieux communs encore trop répandus sur les Brigades Internationales, parfois repris par les tenants d'un vieux fond anticommuniste. Rafraîchissant.