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Rémy CAZALS, Les carnets de guerre de Louis Barthas, tonnelier, 1914-1918, Paris, La Découverte/Poche, 2003, 567 p.

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Un témoignage devenu classique sur la Grande Guerre, dont je n'avais pas encore pris connaissance : celui de Louis Barthas, tonnelier de son état, édité par l'historien Rémy Cazals dès 1978 et réédité depuis. Militant socialiste, Barthas a consigné son expérience sur des cahiers d'écolier, illustrés de cartes postales. Né en 1879, il avait 35 ans en 1914. Père de famille, avec un certain bagage scolaire, engagé dans le syndicalisme, il est aussi catholique non pratiquant, mais devient anticlérical après l'opposition de l'Eglise au socialisme et au syndicalisme. Caporal dans l'infanterie, il est pour bonne partie sur le front d'août 1914 au 14 février 1919, date de sa démobilisation. Ses cahiers sont inspirés des notes qu'il a prises au quotidien, et qu'il a mises au propre après la fin de la guerre. La grande force du témoignage de Barthas, c'est son authenticité, car le tonnelier est un personnage ordinaire : les témoins simples soldats ou presque, dans la guerre de tranchées, ont été assez rares à coucher tout leur parcours par écrit. Le succès de l'ouvrage ne se dément pas, puisqu'il a été vendu à plus de 100 000 exemplaires. C'est même un tournant historiographique, puisqu'on redécouvre alors les témoignages de simples soldats. Tardi en fait un des éléments déclencheurs de son oeuvre de bande dessinée sur la Grande Guerre. Jeunet souhaite l'adapter en film avant de prendre une autre source d'inspiration pour Un long dimanche de fiançailles.

Louis Barthas, en raison de son âge, est mobilisé dans l'infanterie territoriale et reste à Narbonne pendant les premiers mois de la guerre. Mais dès l'automne, en raison des pertes subies, les territoriaux montent au front : Barthas rejoint avec une cinquantaine d'hommes le 280ème régiment d'infanterie, dans l'Artois. La rédaction des cahiers a une finalité pédagogique : Barthas cherche manifestement à faire comprendre l'absurdité d'une guerre vécue au quotidien. 7 des 19 cahiers sont consacrés aux combats en Artois, où Barthas reste jusqu'en mars 1916. Les deux offensives de Joffre en 1915 dans le secteur sont particulièrement sanglantes, Barthas est écoeuré par ce qu'il considère comme un véritable massacre. Le 10 décembre 1915, les pluies diluviennes transforment les tranchées en océan de boue : Français et Allemands se retrouvent à fraterniser, ce qui provoque la colère de l'état-major français. Le régiment de Barthas est dissous et son bataillon passe au 296ème régiment d'infanterie. Barthas n'obtient sa première permission qu'en janvier 1916 : 6 jours pour mesurer combien l'arrière est loin des préoccupations des hommes au front. En mars, Barthas perd son grade de caporal pour avoir refusé d'envoyer ses hommes nettoyer une tranchée en plein jour, pour creuser des feuillées, à découvert, contre le feu adverse. Le régiment est relevé par des Anglais et part en avril 1916 à Verdun, où il combat dans le secteur de la côte 304. Il y reste jusqu'à la fin mai avant de rejoindre la Champagne, un secteur calme, jusqu'à la fin août. Puis le régiment gagne la Somme jusqu'en janvier 1917. Après une nouvelle permission, c'est le sanglant échec de l'offensive du Chemin des Dames en avril. Le 22 mai, le régiment cantonne à l'arrière ; la révolution russe provoque des troubles mais Barthas refuse de prendre la tête d'un soviet. Jusqu'en mars 1918, il combat alors au sein du 248ème régiment composé majoritairement de Bretons. Epuisé, il est envoyé en convalescence dans un hôpital puis chez lui. Il termine la guerre dans un dépôt de Bretagne avant la démobilisation.

Le texte est clairement une référence parmi les témoignages de simples soldats de la Grande Guerre.



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