On
estimait, en septembre 2013, qu'une centaine de Canadiens avait
rejoint le djihad syrien, soit beaucoup plus que leurs homologues
américains. Certains médias parlent de 3 Canadiens qui aurait déjà
été tués en Syrie, sans que les autorités aient confirmé le
chiffre. Un cinéaste américain, Bilal Abdul Kareen, qui a vécu au
milieu d'un groupe islamiste pendant un an, prétend avoir croisé 20
à 30 Canadiens. D'après lui, l'un d'entre eux, Abou Muslim, aurait
participé aux combats autour de l'aéroport de Damas en août 20131.
En
décembre, le gouvernement canadien évoquait « des
douzaines » de citoyens partis en Syrie, sans être plus
précis. Le Canada a mis sur sa liste d'organisations terroristes le
front al-Nosra en novembre 2013, et depuis avril 2014, la législation
s'est renforcée pour empêcher les candidats au djihad de quitter le
sol canadien. Ali Dirie, membre du groupe terroriste Toronto 18 (qui
avait été démantelé en 2006 au milieu de la préparation
d'attentats), a pourtant gagné la Syrie après avoir purgé une
peine de prison : relâché en 2011, il y est mort en septembre
2013. D'origine somalienne, né en 1983, Dirie a joué visiblement un
rôle important dans la radicalisation de certains détenus en
prison, mettant en lumière l'absence de structure canadienne pour
éviter ce processus2.
Un autre Canadien, le fameux Abou Muslim, est apparu dans un
documentaire britannique tourné en Syrie au milieu d'un groupe armé
composé essentiellement de combattants étrangers3.
Ali Dirie, vu ici en 2000.-Source : http://www.thestar.com/content/dam/thestar/news/gta/2013/09/25/toronto_18_ali_mohamed_dirie_convicted_in_plot_dies_in_syria/dirie.jpg.size.xxlarge.promo.jpg |
Le
premier Canadien à périr en Syrie est probablement Jamal Mohamed
Abd al-Kader, né et élevé au Canada, mais dont la famille,
d'origine kurde, vient du nord-est de la Syrie4.
Devenu étudiant, il choisit de rejoindre le djihad et arrive en
Turquie en juillet 2012. Il franchit la frontière et rallie la
brigade Asifat a-Shimal de l'Armée Syrienne Libre, avant de
rejoindre Ahrar al-Sham. Il combat d'abord à Alep durant l'été et
l'automne 2012, puis rejoint Damas en décembre jusqu'à sa mort le
26 février 2013. Etudiant au parcours normal, il avait cependant été
arrêté par la police en décembre 2010 avec deux amis en possession
d'une arme sans avoir de permis5.
Dès juillet 2011, Thwiba Kanafani, avait rejoint les rebelles
syriens, puis, après plusieurs mois, était revenu au Canada pour
rallier de l'aide pour le djihad.
Jamal Mohamed Abd al-Kader.-Source : http://4.bp.blogspot.com/-b6Nu8F5Mslc/UhFvrrkdzjI/AAAAAAAAFV4/0GoBTw1Rf9M/s1600/jamal+abd+qader.jpg |
Récemment,
un djihadiste américain, Abu Turab Al-Muhajir, a annoncé la mort
d'Abou Muslim l'an passé lors de l'assaut de la base aérienne de
Minnagh6.
Abou Mouslim, alias André Poulin, est utilisé dans une vidéo de
recrutement de l'EIIL, bien après sa mort au combat, en juillet
20147.
D'après lui, il y aurait peut-être 100 Canadiens en Syrie, ce qui
correspond à l'estimation haute de l'ISCR. Andre Poulin, c'était
son vrai nom, venait de l'Ontario, et s'était converti à l'islam en
2009. Il était passé devant la justice pour avoir menacé son hôte,
un musulman, car il avait une liaison avec la femme de ce dernier. Un
autre Canadien, Damian Clairmont, alias Abu Talha al-Canadi, a
également été tué à Alep. Il s'était converti à l'islam après
une tentative de suicide. En novembre 2012, il avait annoncé à sa
mère qu'il se rendait en Egypte pour apprendre l'arabe, mais les
services de sécurité canadiens pensaient qu'il a rejoint la Syrie.
Il était surveillé car il faisait partie d'un groupe extrêmiste à
Calgary : il n'aurait pas gagné Le Caire mais Istanbul. Il
appelle sa mère depuis la Syrie en février 20138.
Il avait porté plusieurs noms et selon certaines sources, il aurait
rejoint le front al-Nosra : il aurait d'ailleurs été blessé
puis exécuté par des combattants de l'ASL9.
Damian Clairmont.-Source : http://i.cbc.ca/1.2497627.1389806171!/fileImage/httpImage/image.jpg_gen/derivatives/16x9_620/mustafa-al-gharib-damien-clairmont.jpg |
En
avril 2014, un autre Canadien apparaît dans une vidéo de propagande
de l'EIIL : Farah Mohamed Shirdon, âgé de 20 ans, originaire
de Calgary dans l'Alberta. Il étudiait jusqu'en 2012 au moins au
Southern Alberta Institute of Technology. Dans la vidéo, il brûle
son passeport canadien et menace le Canada et les Etats-Unis. Shirdon
vient d'une famille d'origine somalienne tout à fait aisée :
son père, Abdi Farah Shirdon, est un ancien Premier Ministre de la
Somalie qui a survécu à plusieurs attentats des Shebaab. La soeur
et la mère de Shirdon habitent à Calgary et sont très impliquées
dans les affaires religieuses de la communauté10.
Shirdon est l'un des derniers Canadiens identifiés comme étant
parti se battre en Syrie, mais il n'est pas le seul. Umm Haritha, une
jeune femme de 20 ans, quitte le Canada en décembre 2013 avec une
valise à moitié vide et 1 500 dollars, contre l'avis de ses
parents, et se rend en Turquie. Une semaine plus tard, elle est en
Syrie et épouse Abu Ibrahim al-Suedi, un combattant suédois
d'origine palestinienne qui combat pour l'EIIL. Le 5 mai dernier, le
Suédois périt dans une attaque kamikaze menée par un combattant de
la faction rivale de l'EIIL, le front al-Nosra. Umm Haritha, sur son
compte Twitter, prétend avoir rejoint la Syrie par conviction. Sa
radicalisation date de quatre mois à peine avant son départ, moment
où elle commence à porter le niqab. Depuis qu'elle est veuve, elle
réside à Manbij, une ville proche de la frontière turque contrôlée
par l'EIIL. Elle publie beaucoup de photos de la vie quotidienne de
la ville, et baptise même Raqqa, le bastion de l'EIIL, le « New
York de la Syrie ». Elle ne compte pas revenir au Canada11.
Des femmes portant le niqab photographiées par Umm Haritha à Manjib, en Syrie.-Source : http://pbs.twimg.com/media/BmW-sDSIQAA3PB-.jpg:medium |