Merci à Yann pour cet envoi.
Le n°17 des hors-série du magazine Ligne de Front est consacré aux "légions maudites" du IIIème Reich. Comprenez les volontaires étrangers qui ont servi militairement dans la Heer (plus de 5 millions) et dans la Waffen-SS (325 000).
Une première partie fait d'abord le tour des tenants et des aboutissants de cette collaboration. La Waffen-SS commence à recruter sur des critères aryens dès 1940, tandis que la Wehrmacht débauche elle des recrues sur un spectre plus large -Soviétiques compris. Cependant, les règles s'assouplissent y compris pour la Waffen-SS qui forme une division de musulmans bosniaques dès le printemps 1943, puis à recours aux Baltes, tandis que la Wehrmacht recrute de plus en plus de citoyens soviétiques. Mi-1944, le recrutement étranger représente 13% des effectifs. Les motivations tiennent principalement à l'anticommunisme (en particulier, par exemple, chez les Baltes ou les populations malmenées par le régime soviétique) et parfois à de simples intérêts matériels (solde attractive). Si la Waffen-SS joue de la propagande et de la fraude, aussi, pour mobiliser les Volksdeutsche, à partir de 1944, les volontaires sont de moins en moins nombreux face à des recrues parfois incorporées de force. Dans la Heer, les étrangers forment des unités au niveau du bataillon, jamais au-dessus. Dans la Waffen-SS se pose le problème de la langue, et celui du mépris des Allemands pour des recrues parfois jugées "inférieures", ce qui n'est pas sans conséquence sur l'efficacité des formations. Les volontaires peuvent être considérés comme des traîtres à leur patrie, même si l'URSS n'a pas ratifié la convention de Genève... en tout cas l'égalité des droits des volontaires avec les Allemands n'intervient pas avant 1944 dans la Heer. La valeur combattive des unités est très inégale. Si l'on regarde les chiffres, on est frappé de voir, dans la sphère "germanique", l'importante contribution néerlandaise, bien supérieure aux autres (50 000 contre 20 000 Flamands, qui arrivent en deuxième) ; le faible recrutement dans la sphère "neutre", à l'exception des Lettons (148 000) ; et l'énorme importance des citoyens soviétiques, qui constituent en fait l'essentiel du recrutement étranger (310 000 Russes, 250 000 Ukrainiens, etc). Les nazis peinent d'ailleurs à surmonter leurs préjugés racistes pour pleinement tirer parti de ce recrutement slave ou non-germanique, comme chacun sait.
Les SS estoniens et lettons devant Narva, début 1944.
Les SS estoniens et lettons devant Narva, début 1944.
La deuxième partie passe, en revue, par ordre alphabétique, les pays contributeurs. Mentionnons par exemple les Albanais ou les Arabes, rarement évoqués, le British Freikorps, les Caucasiens, les Cosaques, les Indiens, les Russes (avec des encadrés sur la brigade Kaminski et le cas biélorusse), les Ukrainiens...Les dernières pages reviennent rapidement sur les cas plus isolés, comme les volontaires du monde anglo-saxon ou les Suisses, et les Sud-Américains !
La LVF en action sur le front de l'est.
La LVF en action sur le front de l'est.
Un tableau large, donc, avec force illustrations et encadrés. Deux petites critiques cependant. La première est récurrente : c'est l'absence de sources, surtout avec un sujet comme celui-là, où l'on trouve des ouvrages assez facilement (par exemple sur les SS flamands, recension ici), et étant donné que l'ensemble fait près de 100 pages... la deuxième est un peu différente : personnellement, j'aurais aimé, en fin de volume, une seconde partie explicative comparant les pays contributeurs et déterminant les points communs entre certains, les différences, la performance au combat (qu'est-ce-qui la fait monter, ou au contraire qu'est-ce-qui la fragilise), et peut-être aussi un retour historiographique sur le devenir de ces volontaires dans l'après-guerre et la mémoire de leur participation à l'effort militaire du IIIème Reich. Ces éléments auraient permis d'apporter un peu de recul et d'analyser sur le fond, en plus de la description, le pourquoi du recrutement étranger dans la Wehrmacht et la Waffen-SS. Il me semble aussi, à la lecture de quelques numéros du magazine classique, que ce hors-série compile plusieurs articles (simplifiés) au moins parus au détail dans les numéros courants (à confirmer).
Ci-dessous, à partir de 2:50, des images de l'armée de libération de la Russie (ROA) du général Vlassov, en 1945.